LA MAUVAISE HERBE ET LA GRAINE DE MOUTARDE

Matthieu 13, 24 à 32

Pour expliquer le Royaume ou le Règne de Dieu, Jésus a souvent parlé en paraboles, c’est-à-dire qu’il racontait une histoire, prise dans la vie quotidienne, pour faire comprendre quelque chose du Règne qu’il est venu annoncer.
La parabole du bon grain et de l’ivraie fait appel à l’expérience des cultivateurs.
Voilà un champ ensemencé de bon grain par son propriétaire, puis l’ivraie, une mauvaise herbe, à cause d'une main ennemie, apparaît.
Dès que les serviteurs s’en aperçoivent, au moment où le blé commence à monter en épi, ils proposent d’arracher celle-ci.
Mais ils sont arrêtés dans leur désir de bien faire par le maître, « Vous risqueriez en arrachant l’ivraie d’arracher en même temps le blé. Laissez l’un et l’autre croître ensemble jusqu’à la moisson ».

L’ivraie est une plante qui ressemble beaucoup au blé dans les premières phases de sa croissance.
Mais son grain est amer et, mélangé au blé, il peut causer des malaises graves, voire des empoisonnements.
Ce n’est qu'à la moisson que l’on distingue le mieux les deux plantes : le blé courbe son épi lourd, alors que l’ivraie garde son épi érigé bien droit.
C’était l’une des difficultés des cultivateurs du Moyen-Orient, car les racines des deux plantes sont généralement imbriquées l'une dans l'autre, de façon inextricable.
Voilà pourquoi le maître recommande de laisser les deux croître ensemble.
Les serviteurs sont animés par le désir de mise en bon ordre et de netteté en voulant nettoyer le champ et supprimer la plante qui peut causer des maladies, ce qui semble être le bon sens puisque c'est bien l'ivraie la mauvaise herbe.

Et bien non hélas ! Cette parabole, comme d'autres, apparaît plus difficile à accepter qu'à comprendre.

L’ivraie dans notre monde représente le mal, nul ne sait pourquoi, mais ce mal nous trouble. D'où vient-il ? Qui de nous refuserait son anéantissement définitif pour en être enfin débarrassé ?
Le mal n’est pas qu’une question philosophique, non, elle nous concerne tous. Qui est cet ennemi s'immisçant sournoisement dans les bonnes intentions, dans les décisions et les actions ?
Nous refusons de voir nos efforts d’ensemencement anéantis, et cherchons, de façon spontanée, à préserver la récolte.
C’est une attitude que nous avons tous. Cependant, dans la vie complexe qui est la nôtre, les choses sont rarement bien tranchées.
Le mal et le bien sont très souvent liés et il n’est pas facile de les distinguer. (Derrière de bonnes intentions se cachent même, parfois, des manipulations).

La logique du maître est celle du « Laissez croître l’un et l’autre », le bon grain et l’ivraie.
Elle ne permet pas de trancher, elle est globale et met l’accent sur ce que les deux plantes ont en commun : Elles poussent dans le même champ.
Cette logique réunit, elle ne sépare pas, ainsi elle garde des termes opposés en tension, et cette tension est particulièrement inconfortable à vivre, car le champ est notre monde.
Cela peut nous plonger dans la confusion, nous empêcher de distinguer le bien du mal, et fait craindre l’étouffement du bien par le mal.

Alors que faire ? Faut-il ne rien faire ? Une première observation dans notre texte est que nous devons nécessairement accepter cette coexistence du mal et du bien jusqu’à la moisson. Combattre le mal, que, de surcroît, nous ne discernons pas clairement, n’est peut-être pas notre première tâche. Le plus important, c’est de susciter et de développer le bien, c’est d’ouvrir des perspectives.

Nous distinguerons le bien du mal, grâce à l’attente, la patience et la tolérance imposées par le maître.

C’est peut-être parce que l’ordre du bon grain ou de l’ivraie est trop simple qu’il faut passer par le désordre du mélange et du vivre ensemble. Le coude à coude avec la personne que nous jugeons dangereuse est peut-être la bonne façon d’apprendre à la connaître, et peut-être à l’estimer.
La logique de la coexistence, du dialogue et de notre rapport à l’univers peut faire sortir quelque chose de plus riche et de plus juste. Nous devons nous souvenir que Dieu n’est pas dépassé par le mal, il sait que ce mal est là et qu'il rend la vie des humains difficile et compliquée.
Néanmoins il nous accompagne.
Notre mission consiste à semer la Parole, à promouvoir le bien, à le rechercher, comme nous y invite la Parole de Dieu.
Il ne s’agit pas non plus de mettre un grand nombre de grain dans un trou, quelques-uns suffisent.
La semence du Règne de Dieu est petite, pareille à une graine de moutarde. Notre présence dans ce monde l'est également, s'avérant cependant nécessaire pour témoigner, semer la Parole, et s’engager dans ces semailles et leur croissance.

Notre mission ecclésiale n’est pas d’exclure et de condamner, mais de pénétrer l’histoire de l’humanité en témoignant de la Parole de Dieu et de la Vie nouvelle en Jésus Christ.
La moisson représente la fin du monde, explique Jésus, la fin de notre monde.

Lors de la moisson, lorsqu’un cultivateur trouvait de l’ivraie dans son champ, étant plus courte que le blé, les moissonneurs coupaient le blé juste sous l'épi, la laissant ainsi sur place avec la tige. Les deux étaient ensuite coupés pour servir de combustible.
Tel que l’indique Jésus, ce n’est qu’à la moisson que l’on pourra faire le tri. A ce moment seulement, un bilan sera fait, et un tri opéré. Il est bien précisé « à la fin des temps » ! et que le tri n’est pas de notre ressort !

Il ne nous appartient donc pas de commencer à trier sur cette terre, aussi n’arrachons pas trop vite, ne condamnons pas trop vite non plus ce qui paraît mauvais.
 

Matthieu 13, 24 à 32

La mauvaise herbe

24 Jésus utilise pour eux une autre comparaison : « Le Royaume des cieux ressemble à ceci : Un homme a semé du bon grain dans son champ.
25 Une nuit, pendant que tout le monde dort, son ennemi arrive. Il sème de la mauvaise herbe au milieu du bon grain et il s’en va.
26 Les plantes poussent, elles produisent les épis, et la mauvaise herbe paraît aussi.
27 Les serviteurs vont dire au propriétaire : “Maître, tu as semé du bon grain dans ton champ, n’est-ce pas ? D’où vient donc cette mauvaise herbe ?”
28 Il leur répond : “C’est un ennemi qui a fait cela.” Les serviteurs lui disent : “Est-ce que tu veux que nous allions enlever la mauvaise herbe ?”
29 Le propriétaire leur dit : “Non ! En enlevant la mauvaise herbe, vous risquez d’arracher aussi les épis.
30 Laissez tout pousser ensemble jusqu’à la récolte. Et, au moment de la récolte, je dirai aux ouvriers : Enlevez d’abord la mauvaise herbe, faites des tas pour la brûler. Ensuite, ramassez les épis et mettez la récolte dans mon grenier.” »

La graine de moutarde

31 Jésus utilise pour eux une autre comparaison : « Le Royaume des cieux ressemble à ceci : Un homme a pris une graine de moutarde pour la semer dans son champ.
32 C’est la plus petite de toutes les graines, mais quand elle a poussé, c’est la plus grande des plantes. Elle devient un arbre, et les oiseaux viennent faire leurs nids dans ses branches. »