LE BON BERGER

Jean 10, 1 à 1 et 27 à 30 - Jérémie 23, 1 à 8

Image de berger et de moutons ou brebis, selon le choix de nos traductions…
Brebis avec une certaine idée de douceur, de réconfort ?
Mouton, plus méprisant parce cela évoque l’instinct grégaire, les fameux « moutons de Panurge » ?
Quoi qu’il en soit, dans le discours que tient ici Jésus à la cantonade, le personnage principal est le berger, rôle qu’endosse ici Jésus lui-même après avoir été vivement contesté par quelques Pharisiens pointilleux ou jaloux de leur autorité.

Nous savons que cette image du berger est très fréquente dans la Bible, vous avez probablement chacun en mémoire quelque texte qui la mentionne, ne serait-ce que le fameux psaume 23 « le Seigneur est mon berger, je ne manque de rien ... », psaume que nous avons chanté tout à l’heure.
Dès les temps anciens, Israël a reconnu en son Dieu un « bon berger », qui conduit celui qui se confie en lui, sur des sentiers de justice, qui offre le repos, la nourriture, l’apaisement, un berger qui accompagne même dans les situations les plus difficiles, telle l’obscure vallée de l’ombre de la mort évoquée par ce psaume ...
Dieu, berger de son peuple, a cependant besoin des relais que sont ceux que les prophètes appellent les dirigeants, mais auxquels ils s’en prennent sévèrement comme nous l’avons entendu dans le texte de Jérémie ; oui, bien souvent ceux qui ont des responsabilités pour le peuple se comportent en mauvais bergers : ils ont dispersé le peuple ou même ils l’ont abandonné
Et l’on pense alors au mercenaire dont parle Jésus quand il reprend à son compte l’image du berger. Le texte de l’évangile en effet joue beaucoup sur les oppositions : le bon berger face au mercenaire ; celui qui entre par la porte face au voleur qui passe par-dessus le mur… de même que chez les prophètes de l’ancien Israël se disait l’opposition entre les mauvais bergers et le bon berger, héritier de la maison de David que Dieu enverrait pour secourir les siens.

Par les paroles de Jésus transmises ici dans l’évangile selon Jean, ceux qui ont entendu Jésus s’exprimer ainsi ont déjà pu voir en lui ce bon berger, envoyé par Dieu, venu secourir les siens. Mais de quel secours s’agit-il ?
Le contexte de l’évangile est éclairant : en effet, dans le chapitre qui précède celui-ci (= Jean 9), Jésus a guéri un homme aveugle de naissance : non seulement il a rendu la vue à cet homme, il l'a guéri physiquement mais aussi il l'a entraîné sur le chemin d'une vie complètement renouvelée ; en effet d'une vie de mendiant silencieux toujours au même bord du
même chemin, Jésus a fait passer cet homme à une vie de mouvement, de responsabilité, de paroles, par exemple quand l'ancien aveugle doit répondre à tous ceux qui s'étonnent et l'interrogent : est-ce bien lui ? Et qu'en disent ses parents ? Et qui est celui qui lui a rendu la vue ? Un pécheur probablement ! Et comment a-t-il fait ? Etc.
Cet ancien aveugle a été amené devant les Pharisiens, grands connaisseurs de la Loi et de son interprétation rigoureuse ; devant eux, nous voyons l'ancien mendiant aveugle soutenir fermement la conversation avec ses contradicteurs jusqu'au moment où Jésus lui-même intervient auprès de cet homme puis dans une conversation avec quelques Pharisiens dont Jésus dénonce précisément l'aveuglement ! La violence des propos est flagrante et plus encore la violence de l'expulsion de l'aveugle guéri (ch.9, v. 34), chassé par ceux vers qui il avait été amené pour être interrogé.
Jésus lui-même, un peu plus tard sera menacé de lapidation et d'arrestation mais pour le moment il échappe encore à ses adversaires et détracteurs.

C'est au milieu de tant d'agressivité, d'opposition et de violence, que Jésus ose affirmer calmement « Je suis le bon berger » : se différenciant des Pharisiens apparemment sûrs d'eux et sûrs de leur référence à la Loi de Moïse, Jésus affirme qu'il vient dans le monde offrir un chemin de vie où la Loi n'enferme pas les personnes dans un ensemble de règlements et de textes écrits et comme gravés dans la pierre ; Jésus invite à un chemin où la Loi est chemin de vie et son observance culmine dans l'attention et l'amour pour le prochain. Jésus vient de le manifester avec cet aveugle rencontré au bord du chemin et à qui il a manifesté une attention bienveillante et, par là, le renouveau de sa vie comme une nouvelle naissance.

Le discours sur le bon berger n'est pas qu'une belle parabole, il est l'expression de ce que Jésus manifeste par son comportement, ses paroles et ses actes.
Nous savons que cette image du bon berger a connu un grand succès dans l'histoire, et qu’elle est souvent représentée depuis les débuts du christianisme, gravée dans la pierre ou, plus tard, comme effigie sur des méreaux, ces pièces de métal qui permettaient aux protestants de se reconnaître aux temps des persécutions et du Désert. Jésus donc est le bon berger, celui que suivent les brebis qu'il connaît et qui le reconnaissent à sa voix. Écoute mutuelle et reconnaissance : les brebis écoutent sa voix et le berger les appelle, chacune par son nom (v.3).
La relation entre les brebis et le berger est une histoire vraiment personnelle, « chacune par son nom » et elles reconnaissent sa voix.
La Loi pourtant n'est pas invalidée ni superflue, Jésus le sait bien, lui qui dit être venu non l'abolir mais l'accomplir (Matthieu 5, v. 17-20) ; la Loi est essentielle à la structuration de la vie sociale et de la vie de chaque personne. Mais quand il s'agit de la vie de chacun, du plus intime de la vie de chacun, la relation est plus qu'une question de loi et de respect de la Loi ; l'essentiel alors est le nom personnel de chacun, la personnalité reconnue, l'écoute et la reconnaissance mutuelles.
C'est dans ce respect infini que chaque personne peut trouver une place, sa place.

L'enclos des brebis est, dans le judaïsme, une image pour parler de la Loi ; l'enclos, la Loi qui délimite, donne un cadre … et nous voyons, dans les évangiles et les polémiques de Jésus avec certains Pharisiens, comment cet enclos peut devenir une prison … Jésus au contraire présente ici l'enclos des brebis comme un espace offert, lieu de protection et de sécurité, espace d'où l'on peut sortir car le berger, le bon berger sait emmener ses brebis au-dehors vers la nourriture nécessaire.
Berger, il est aussi lieu de passage puisqu'il dit qu'il est la porte, c'est-à-dire passage obligé pour entrer et sortir de l'enclos, passage obligé pour recevoir la vie offerte, vie en abondance.
Pour trouver cette porte, il s'agit d'être à l'écoute, afin de reconnaître la voix de Dieu qui, en Jésus-Christ, nous appelle.
Ne pas rester repliés sur nous-mêmes, nos certitudes ou nos peurs mais entendre cette voix qui nous invite à aller et venir : à la fois séjourner dans l'enclos, méditer la parole, prier et sortir de l'enclos, aller vers les pâturages du monde, au plein vent de l'Histoire où notre témoignage est attendu.
Aller vers les autres, dans le monde pour recevoir et pour donner, aller pour témoigner de la vie en abondance que nous recevons par la foi en Jésus, le bon berger.

L’écouter, le reconnaître et nous laisser reconnaître, puis avancer en bonne compagnie. Souvenons-nous donc de l'amour du bon berger pour chacun, chacune d'entre nous. Cet amour qui nous accueille et nous accepte tels que nous sommes, un amour à partager et qui nous donne force et audace pour avancer sur les chemins de la vie.
Amen

 

Jean 10, 1 à 10 et 27 à 30

1« Oui, je vous le dis, c’est la vérité : si quelqu’un n’entre pas par la porte dans l’enclos des moutons, mais s’il passe par-dessus le mur à un autre endroit, c’est un voleur et un bandit.
2 Mais celui qui entre par la porte, c’est le berger des moutons.
3 Le gardien lui ouvre la porte, et les moutons écoutent la voix du berger. Il appelle ses moutons chacun par son nom et il les conduit dehors.
4 Quand il les a tous fait sortir, il marche devant eux. Et ses moutons le suivent, parce qu’ils connaissent sa voix.
5 Ils ne suivront jamais quelqu’un d’autre. Au contraire, ils fuiront loin de lui, parce qu’ils ne connaissent pas la voix des autres personnes. »
6 Jésus utilise cette comparaison, mais les gens ne comprennent pas ce qu’il veut dire.
7 Alors Jésus ajoute : « Oui, je vous le dis, c’est la vérité : la porte pour les moutons, c’est moi.
8 Tous ceux qui sont venus avant moi sont des voleurs et des bandits. Mais les moutons ne les ont pas écoutés.
9 La porte, c’est moi. Celui qui entre en passant par moi sera sauvé. Il pourra entrer et sortir et il trouvera de la nourriture.
10 Le voleur vient seulement pour voler, tuer et détruire. Moi, je suis venu pour que les gens aient la vie, et pour que cette vie soit abondante.

27 Mes moutons écoutent ma voix. Moi, je les connais et ils me suivent.
28 Je leur donne la vie avec Dieu pour toujours. Ils ne mourront jamais, et personne ne pourra les arracher de ma main.
29 Mon Père me les a donnés, et mon Père est plus puissant que tout. Personne ne peut rien arracher de la main du Père.
30 Mon Père et moi, nous sommes un. »

Jérémie 23, 1 à 8

1-2 Le Seigneur déclare : « Quel malheur ! Les bergers qui dirigent mon peuple détruisent les moutons de mon troupeau et les laissent partir de tous côtés ! » C’est pourquoi, voici les paroles du Seigneur, Dieu d’Israël, contre ces bergers : « Vous avez laissé partir mon troupeau de tous côtés, vous avez chassé mes moutons et vous ne vous êtes pas occupés d’eux. Eh bien, moi, je m’occuperai de vous à cause du mal que vous avez commis. Moi, le Seigneur, je le déclare.
3 « Ensuite, je vais rassembler moi-même le reste de mes moutons, dans tous les pays où je les ai chassés. Et je les ramènerai dans leurs pâturages. Là, ils deviendront très nombreux.
4 Je leur donnerai comme chefs de vrais bergers. Avec eux, mes moutons n’auront plus peur, ils ne seront plus effrayés, et aucun ne manquera jamais. » Voilà ce que le Seigneur déclare.
5 Le Seigneur déclare : « Le jour vient où je ferai naître un vrai fils de David. Il gouvernera comme un bon roi, il agira avec intelligence, il fera respecter le droit et la justice dans le pays.
6 À ce moment-là, le royaume de Juda sera libéré, et le peuple d’Israël vivra en sécurité. Voici le nom qu’on lui donnera : “Le-Seigneur-est-notre-salut .” »
7 Le Seigneur déclare : « Oui, le jour vient où personne ne dira plus : “Je le jure, par le Seigneur vivant, qui a fait sortir d’Égypte les Israélites… !”
8 Mais on dira : “Je le jure, par le Seigneur vivant, qui a fait sortir les Israélites des pays du nord et de tous les pays où il les avait chassés pour qu’ils habitent de nouveau dans leur pays !” »