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- Créé le dimanche 21 septembre 2014 18:22
L'AMOUR NE MEURT JAMAIS
1 Corinthiens 13 - Psaume 121 - Matthieu 11, 25 à 30
S'il est un mot répandu à l'heure actuelle, c'est bien le terme amour. A défaut de le vivre, les êtres humains l'emploient constamment. C'est peut-être justement parce qu'ils ne le vivent pas qu'ils en parlent beaucoup.
La majorité des livres, la plupart des chansons, des poèmes écrits, font référence à l'amour.
La Bible aussi parle abondamment de l'amour, notamment par cet admirable chapitre 13 de la 1ère lettre de l'apôtre Paul aux chrétiens de Corinthe. Il semblerait que ce soit un cantique, un poème déjà connu dans l'Eglise primitive, et que l'apôtre aurait inclus à sa lettre.
Par ce texte, Paul tente, en quelque sorte, une définition de l'amour. Exercice difficile !
Qu'est-ce que l'amour ? Comment l’apôtre Paul présente-t-il l’amour dans ce 13ème chapitre de sa première lettre aux Corinthiens ?
Les versets 1 à 3 disent ce que l'amour n'est pas :
Quand je parlerais les langues des humains et des anges, si je n'ai pas l'amour, je suis une pièce de bronze qui résonne ou une cymbale qui retentit …
L'amour n'est pas le mysticisme, la relation avec le divin au point de parler son langage ; un langage qui se voudrait secret, mystérieux, réservé à des initiés.
L'amour n'est pas une extase, un autre monde, un autre univers qui nous ferait perdre le sens des réalités ; malgré le romantisme qui veut nous faire croire qu'il n'y a pas d'amour sans folie et émotions incontrôlées. Non, l'amour ne s'oppose pas à la raison et à la maîtrise de soi.
L'amour, ce n'est pas l'ésotérisme, l'étrange, le fantastique. Il ne s'accompagne pas de manifestations extatiques, ni même d'attitude, de comportement ou de liturgie obligés. L'amour est plus profond que cette apparence.
Tout ceci, pour l'apôtre, n'est que du bruit, si c'est vécu sans amour.
Quand j'aurais la capacité de parler en prophète, la science de tous les mystères et toute la connaissance, quand j'aurais même toute la foi qui transporte des montagnes, si je n'ai pas l'amour, je ne suis rien.
L'amour n'est pas la connaissance, même la connaissance du divin, puisqu'il est question du don de prophétie qui consiste à parler au nom de Dieu. En effet, pour parler de la part de Dieu, il faut connaître Dieu. Et cette connaissance intellectuelle, théologique est positive, mais elle n'implique pas forcément l'amour.
L'amour n'est pas la capacité religieuse d'énoncer des vérités que personne ne connaît, ni même de faire des miracles, comme de transporter des montagnes par la foi. L'amour ne fait pas le spectacle. Ce qui fait le plus de bruit n'est pas obligatoirement le plus fort.
L'amour n'est pas la connaissance, car par le biais de la connaissance on exerce une domination sur autrui, comme avec le spectaculaire. Or aimer, ce n'est justement pas dominer, c'est donner, c'est se donner. Mais, là encore, avec quel état d'esprit donne-t-on ?
Quand je distribuerais tous mes biens, quand même je livrerais mon corps pour en tirer fierté, si je n'ai pas l'amour, cela ne me sert à rien.
L'amour n'est pas un geste, quand bien même ce geste serait total, jusqu'au sacrifice de soi.
L'amour n'est pas un geste, car le geste peut être sans fondement, n'être qu'apparence.
L'amour n'est pas un geste, car le geste n'élimine pas le calcul. Paul parle, en effet, de la fierté que l'on peut tirer d'un geste médiatique. Or l'amour est sans calcul, sinon il n'est pas.
Certes, l'action ne s'oppose pas à l'amour. L'amour ne se manifeste pas par la passivité, l'inaction. L'apôtre dit bien que le geste n'est rien s'il est sans amour ; ce qui sous-entend qu'il est quelque chose lorsqu'il est le résultat de l'amour.
De même le mystique, le religieux, le savant … peuvent agir par amour, et leurs actions ne sont alors pas rien. L'amour donne encore plus de valeur à leurs entreprises.
Mais tout ceci ne nous dit pas ce qu'est l'amour. C'est pourquoi Paul continue.
Les versets 4 à 7 essaient de définir l'amour en disant ce qu'il produit ou ce qui s'oppose à lui :
L'amour s'oppose à la jalousie, à l'orgueil, au calcul, à l'intérêt personnel, au soupçon, à la colère et à l'injustice.
L'amour est patient, bon, il se réjouit de la vérité (c'est-à-dire de ce qui est sans calcul), il pardonne, il fait confiance, il supporte, il espère toujours.
En clair, l'amour consiste à voir les choses et les personnes non en fonction de nos propres préoccupations, mais de l'intérêt d'autrui. L'amour, c'est le contraire de l'égoïsme. C'est pourquoi aimer son conjoint ou ses enfants pour en tirer un plaisir, une gloire, ou toute autre satisfaction, ce n'est pas les aimer.
On voit bien, à peu près, ce que cet amour peut être, mais on n'a pas une véritable définition de l'amour. Pourquoi ? Parce que, dans ce texte, on n'a pas de modèle de l'amour.
En regardant le genre humain, que voyons-nous ? Des choses intéressantes, certes, mais toujours partielles, dit l'apôtre : une connaissance incomplète, une religion limitée … Et parce qu'elles sont partielles, elles disparaîtront. On n'a jamais la totalité, la perfection, la justice. Nous voyons comme avec un miroir. Nous voyons des images, des reflets, d'une manière obscure. Nous n'avons pas accès au vrai modèle de l'amour.
Et Paul parle de l'enfant. Est-ce lui le modèle ?
Avec Rousseau, certains voudraient voir en lui la référence initiale, le modèle à conserver ; comme si l'enfant était, par nature, parfait, idéal. L'enfant est innocent, oui, mais pas juste, c'est-à-dire conforme au projet final de Dieu. L'enfant n'est pas non plus pécheur par nature, coupable d'un péché originel qu'il n'a pas commis lui-même, comme l'a enseigné Augustin au 4ème siècle. C'est pourquoi l'enfant n'a pas besoin d'être lavé d'un péché quelconque ; et pourtant il peut être baptisé, car le baptême n'efface pas le péché ; mais il est témoignage de l'amour de Dieu pour le baptisé (et pour tous ceux qui ne le sont pas), et orientation de vie dans le cadre de cet amour.
Comme tout le monde, l'enfant est naturellement égoïste ; ne serait-ce que parce que, comme tout animal, il a en lui l'instinct de survie, sinon il ne réclamerait pas lorsqu'il a faim. Ce n'est pas une faute, c'est une orientation qui l'aide à survivre, mais qui l'empêche de vivre naturellement l'amour.
L'enfant ne vient pas de lui-même à Dieu, s'il n'est attiré. C'est pourquoi il faut l'accompagner comme Dieu l'accompagne. C'est pourquoi il faut l'instruire pour lui donner les éléments qui lui permettront de faire ses propres choix. Et il lui faut du temps pour passer du réflexe de gagner sa vie à la liberté du don de sa vie.
Pour l'apôtre, l'enfant est le type même du partiel, de l'inachevé. Il n'est pas le modèle de l'amour. Ce modèle existe-t-il ? Oui ! C'est Jésus !
Jésus est la personnification de l'amour.
Lui seul a vécu pleinement l'amour.
Bien sûr, d'autres êtres humains ont manifesté l'amour vrai, parce qu'ils ont été inspirés, saisis, portés par cet amour qui vient du Christ. L'être humain est trop naturellement égoïste pour inventer l'amour. Il faut se souvenir que ce chapitre 13 de la 1ère lettre de Paul aux Corinthiens s'inscrit dans le contexte des dons spirituels. Le chapitre 12, en effet, dresse une liste des dons de l'Esprit. L'amour en fait partie.
Jésus a tout supporté, pardonné, avec patience, bonté, joie et espérance. Jusqu'au don total de lui-même, sans calcul, ni arrière-pensée.
L'amour parfait, total, accompli, c'est Jésus.
C'est pourquoi il nous accueille comme nous sommes, partiels, inachevés et naturellement portés à n'apprécier que ce qui nous ressemble et à n'aimer que nous-mêmes. Et nous sommes, finalement, fatigués de cet égoïsme qui nous oppose sans cesse aux autres. Quand laissera-t-il la place à l'amour ?
Jésus nous dit : Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés.
Venez comme vous êtes, non parce que vous avez accompli ce qu'il fallait pour être reçu, mais parce que je vous aime. Tout est possible grâce à cet amour donné gratuitement par Dieu ; car si l'amour est un objectif, il est encore plus un cadeau.
Venez à Christ, et alors vous entrerez dans le royaume de ce qui demeure pour l'éternité, c'est-à-dire de l'amour, car l'amour ne meurt jamais.
Que cette espérance nous fasse vivre dans la foi.